La sangsue : une urgence respiratoire inhabituelle /The leech: An unusual respiratory emergency

Reçu le 17 juin 2014 ; accepté le 24 juillet 2014 © SRLF et Springer-Verlag France 2014 à l’éditeur, La dyspnée laryngée est un motif rare de consultation aux urgences et l’inhalation de corps étranger fait partie des pre-miers diagnostics à évoquer, surtout chez l’enfant. Nous rap-portons l’observation d’un jeune adulte se présentant aux urgences pour détresse respiratoire causée par l’inhalation d’une sangsue. Il s’agissait d’un homme de 36 ans, habitant en zone rurale, sans antécédents notables, admis aux urgences pour dyspnée laryngée d’installation brutale. Il était conscient, tachycarde à 105 battements par minute, polypnéïque à 28 cycles par minute avec une dyspnée aux deux temps respi-ratoires associée à un tirage sus-sternale et une SpO 2 à 92 % en air ambiant. L’examen de l’oropharynx par l’abaisse-langue et la laryngoscopie indirecte objectivaient la présence d’une muqueuse inflammatoire sans lésions visibles. Le patient recevait une nébulisation de bronchodilatateurs et un bolus de corticoïdes. La radiographie du thorax était nor-male et le bilan biologique et infectieux sans particularités. L’évolution était marquée par une stabilisation clinique avec normalisation des paramètres vitaux et gazométriques per-mettant le retour au domicile et un suivi en consultation d’otorhinolaryngologie. Vingt-quatre heures plus tard, le patient était réadmis aux urgences dans un tableau de détresse respiratoire avec une polypnée à 36 cycles par minute, sueurs profuses, difficultés à parler, SpO 2 à 54 % en air ambiant et cyanose péribuccale ne répondant ni à la nébulisation par béta-2-mimétiques ni à la ventilation non invasive, d’où la décision d’intubation, permettant à la laryn-goscopie directe de découvrir une sangsue accrochée aux deux cordes vocales empêchant leur ouverture. La prise en charge consistait alors en une extraction délicate de la sang-sue par une pince longue avec crochets sous laryngoscopie directe rigide (Fig. 1). Le patient était intubé après l’extrac-tion puis rapidement extubé. L’évolution était favorable sous inhalation d’hexamidine et de lidocaïne hydrochloride. L’origine de l’infestation était attribuée soit à une baignade en rivière soit à la consommation d’eau de puits. La sangsue est un ver hermaphrodite appartenant à la classe des hirudinés [1]. Il en existe plus de 700 espèces et celles qui attaquent l’homme peuvent être divisées en deux classes : les sangsues de terre qui se lient à la peau par leurs mâchoires puissantes, et les sangsues aquatiques qui vivent en eau douce et ne peuvent se fixer qu’aux tissus mous du corps humain grâce à leurs ventouses. Les sangsues aquati-ques sont presque ubiquitaires et vivent principalement dans les marais des zones tropicales. Elles ont un pouvoir de liai-son développé reposant sur leurs mâchoires et leurs ventou-ses présentes sur les 102 anneaux qui les constituent. Cet accrochage à l’hôte est renforcé par des sécrétions salivaires jouant un rôle aussi bien d’anesthésique local que d’anticoa-gulant et d’antiagrégant plaquettaire induisant une déperdi-tion sanguine pouvant être responsable d’anémie parfois très sévère [2]. Fig. 1 Sangsue

Référence1346
Année2015
TypeArticle
Lien document
AuteurTouzani S
Auteurs associésJoulali T, Derkaoui A, Shimi A, Khatouf M
DisciplineRéanimation Polyvalente 1
RevuePresse Med
Référence Revue23:546-547