Troubles psychiatriques chez les patients infectes par le VIH (A propos de 90 cas)

L’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) ne se limite plus à la seule expression d’infections opportunistes favorisées par l’immunodépression comme aux premiers temps de sa découverte. Depuis l’utilisation des multithérapies antirétrovirales, elle se manifeste également à travers une multitude de symptômes d’origines très diverses parmi lesquels les troubles psychiatriques sont fréquents. Les troubles psychiatriques sont, dans ce contexte, souvent complexes, intriqués et d’étiologie variable (action directe du virus ou des traitements sur le système nerveux central, réaction du sujet face à l’évolution de la maladie, addictions associées…). La connaissance de leur clinique permet une évaluation diagnostique efficiente, des soins psychiatriques optimises et intégrés à une approche pluridisciplinaire cohérente du patient et de sa maladie ainsi que la mise en place d’actions de prévention et d’éducation adaptées. Jusqu’à ce jour, aucune étude n’a été menée sur l’échelle nationale, d’où l’idée de réaliser une étude au sein de notre formation. Objectifs : le but de notre travail est d’évaluer la prévalence des troubles psychiatriques chez les patients atteints du VIH ainsi que les facteurs de risque de leur survenue. Méthodologie : nous avons mené une étude transversale a recrutement prospectif auprès des 90 patients atteints du VIH suivis au niveau du service de médecine interne du CHU Hassan II de Fès, à l’aide d’un questionnaire pré-établi et des échelles d’évaluation : le MINI (Mini international neuropsychiatric interview) dans sa version marocaine, ainsi que l’inventaire de dépression de Beck et l’échelle d’anxiété Hamilton. Résultats : Chez les 90 patients infectés par le VIH de notre série, la dépression était le trouble psychiatrique le plus fréquent avec une prévalence de 36,67 %, les troubles anxieux représentent le deuxième trouble psychiatrique observé avec une prévalence de 27,78% et le risque suicidaire vient en 3ème position avec une prévalence de 8,89%, aucun autre trouble psychiatrique n’a été constaté chez nos patients. Notre étude nous a permis d’identifier certains facteurs de risque de survenue de troubles psychiatriques au cours du VIH, concernant la dépression : un revenu personnel < 2000dh, la présence d'un retentissement du VIH sur les loisirs et la sexualité et l'absence du plaisir lors des rapports sexuels représentent les principaux facteurs de risque avec deux périodes à risque qui sont la phase asymptomatique et le stade C de la maladie. Concernant les troubles anxieux : le sexe féminin, la non scolarisation, le chômage, un revenu personnel < 2000dh, les antécédents personnels de tentative de suicide, la présence d'un retentissement du VIH sur les loisirs, l'absence du plaisir lors des rapports sexuels, et la réaction par une symptomatologie anxio-dépressive à l'annonce de la séropositivité sont les principaux facteurs de risque identifiés. L'antécédent personnel de tentative de suicide était le seul facteur de risque qui avait une relation significative avec le risque suicidaire chez nos malades. Conclusion : La dépression, les troubles anxieux et le risque suicidaire sont les troubles psychiatriques les plus rapportés chez les patients infectés par le VIH dans notre étude. Ils doivent être recherchés systématiquement chez tout patient séropositif au VIH et prises en charge afin d'améliorer la qualité de vie chez ces patients ce qui permettra une meilleure observance au traitement antirétroviral et une meilleure évolution de la maladie.