Les cystectomies pour cancer de vessie : données anatomopathologiques et opératoires, résultats carcinologiques, mortalité et morbidité (A propos de 74 cas)

La cystectomie est toujours considérée comme traitement de référence des tumeurs infiltrantes et des tumeurs superficielles à haut risque de la vessie malgré une mortalité et une morbidité non négligeables. Les résultats carcinologiques de ce geste s’améliorent mais restent toujours insuffisants et ouvrent la voie à des traitements associés afin d’améliorer son pronostic. Pour arriver à cette fin, les résultats doivent être évalués et les facteurs pronostiques déterminés. Les dossiers de 74 patients ayant eu une cystectomie pour cancer de vessie de 2002 à 2011 dans le service d’urologie du CHU Hassan II de Fès ont été analysés. Les données cliniques, radiologiques, anatomopathologiques et opératoires ainsi que les résultats carcinologiques, la morbidité et la mortalité ont été rapportées. Les facteurs prédictifs de l’infiltration tumorale et les facteurs pronostics de la survie ont été relevés avec l’aide du programme STATA*12. Le sexe ratio de notre série a été de 11,3 hommes pour une femme, leur âge moyen a été de 61 ans, 82% avaient un score ASA 1 ou 2, 76% étaient tabagiques. 100% de nos patients avaient une hématurie, 55.8% une base vésicale infiltrée au toucher pelvien et 59% une hydronephrose au scanner. 84% des tumeurs étaient infiltrantes à la RTUV. La cystectomie a été réalisée après un délai moyen de 86.5 jours. Nous avons réalisé une dérivation urinaire externe chez 75%, une entérocystoplastie chez 22% et un Coffey chez 3% des patients dont la plupart étaient de type Bricker ou Hautmann. 79% ont nécessité une transfusion péri-opératoire. L’examen anatomopathologique de la pièce de cystectomie a retrouvé 78% de carcinomes urothéliaux, 88% des tumeurs étaient infiltrantes, 8% superficielles et 4% disparurent à cet examen. La surstadification a concerné 43.9% et la sous-stadification 19.6% des patients. 17% avaient un pN+ pour un nombre moyen de ganglions prélevés de 5.5. La mortalité périopératoire a été de 4% à la fin de l’étude, la morbidité précoce de 20.5% et la morbidité tardive de 20% dominée par les sténoses urétérales. Le suivi moyen a été de 16.5 mois allant de 6 à 60 mois. 41 % de patients ont eu une récidive locale dans un délai moyen de 10 mois (2 à 24 mois) et 23.8% une métastase dans un délai moyen de 13 mois (2 à 36 mois) essentiellement pulmonaire. La survie globale à 2 ans et à 5 ans a été de 51% et 24% et la survie sans récidive de 57% à 2 ans. Les facteurs prédictifs de morbidité précoce ont été l’âge>=70 ans et le score ASA 3 et 4 avec des valeurs p respectives de 0.007 et 0.04. Les facteurs prédictifs significatifs de l’infiltration tumorale ont été l’infiltration de la base vésicale, le délai avant cystectomie <12 semaines, le stade T infiltrant de la RTUV et l'infiltration de la graisse péri-vésicale au scanner avec des valeurs p respectives de 0.007, 0.0006, 0.0006 et 0.01. Les facteurs pronostiques significatifs de survie globale ont été le stade pT infiltrant, le pN positif, le score ASA 3+4, l'hydronephrose, l'envahissement prostatique, le stade T infiltrant, l'engainement péri-nerveux et la surstadification avec des valeurs p respectives de <0.0001, 0.006, 0.001, 0.02, 0.002, 0.02, 0.0008 et 0.004 ainsi que l'infiltration de la base vésicale au toucher pelvien et la présence d'emboles vasculaires pour une valeur p=0.05. Les facteurs prédictifs significatifs de survie sans récidive ont été le stade pT infiltrant, l'envahissement prostatique et l'engainement péri-nerveux avec des valeurs p de 0.03, 0.04 et 0.006 ainsi que l'infiltration de la base vésicale et la surstadification pour une valeur p=0.05. Différents facteurs cliniques, radiologiques et anatomopathologiques sont intervenus comme facteurs prédictifs de l'infiltration tumorale, la morbidité et la survie notamment l'infiltration de la base vésicale au toucher pelvien et le stade T pour le premier paramètre ; l'âge et la morbidité pour le deuxième et le stade pT et pN pour le troisième paramètre. La mortalité péri-opératoire est en baisse dans l'expérience récente de notre service, la morbidité est semblable à celle de la littérature et la survie à long terme relativement faible reflète le taux important d'infiltration tumorale dans la présente série et traduit l'écart de moyens avec les centres de référence ainsi que la difficulté d'accès à des traitements associés pour la durée de cette étude